Traitement de la douleur

Consultation de Médecine de la Douleur

Dr Stéphane Charré – médecin anesthésiologiste et médecine de la douleur

La douleur est définie par l’Association Internationale pour l’Etude de la Douleur (IASP) depuis 1994 comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable secondaire à une lésion tissulaire réelle, potentielle ou décrite en terme d’une telle lésion ».

Principes de base de la prise en charge de la douleur

L’évaluation et la prise en charge de toute douleur doit toujours être globale. On parle d’une approche bio-psycho-sociale.

Cette approche comprend une recherche de la lésion qui a provoqué ou qui provoque toujours la douleur. Quel tissu, quel organe est ou sont blessé(s), lésé(s) ? Quel est le mécanisme de la douleur ? Quels bilans biologiques ou radiologique faut-il envisager ? Faut-il encore faire des bilans ?

Cette approche nécessite impérativement une recherche du contexte d’apparition de la douleur et des facteurs de chronicité, qui la font durer plus que de raison. Car il n’existe pas de traitement d’une douleur sans prise en compte de ces facteurs. Sans quoi, tout traitement envisagé, si juste soit-il, peut aboutir à l’échec. Ces facteurs contextuels sont multiples et parfois subtils à détecter, voire enfouis inconsciemment ou cachés volontairement par le patient. Ils nécessitent un entretien parfois long et délicat. Mais cela débouche souvent sur une prise en charge globale – profonde – de la douleur et de la santé du patient en général, perpétuellement avec la recherche de son accord.

Cette approche est aussi sociale, écologique (l’écologie est la science ayant pour objet les relations des êtres vivants avec leur environnement et les autres êtres vivants), c’est-à-dire qu’elle envisage les interactions du patient et de « sa » douleur avec l’environnement du patient. C’est pourquoi nous parlons de l’aspect écologique de la douleur. Quels conséquences – positives ou négatives – la douleur a-t-elle sur la vie du patient ? Avec la famille, les enfants, les amis, les ennemis, le travail, les collègues, le manager, le « chef », le patron, l’employeur, les activités annexes (loisirs, sports, activités…). C’est parfois dans cette troisième approche que se trouve une clé d’amélioration de la douleur du patient.

Car la douleur – comme toute maladie – n’est pas un problème corporel isolé. C’est un problème du corps qui interagit. Elle a de multiples conséquences sur la vie des patients et de leur entourage.

Ne pas les voir, ne pas les questionner, ne pas les envisager peut conduire à des impasses, des « résistances » aux traitements proposés.

La prise en charge de la douleur nécessite un travail d’équipe.

D’abord et surtout avec le patient, qui doit comprendre, discuter, questionner ce que lui annonce le médecin. Il n’existe pas de traitement de la douleur qui ne prend pas en compte les attentes du patient. Les connaitre, c’est déjà gagner du terrain sur la douleur.

Le médecin de la douleur joue le rôle d’un entraineur à la manière d’un sportif. Un entraineur sportif connait le sportif, ses capacités physiques et mentales. Il connait aussi ses attentes, ses objectifs. Le sportif veut-il participer à des compétitions départementales ou veut-il aller aux jeux olympiques ? L’objectif est-il adéquat ? Trop bas ? Trop haut ? Trop lent ? Trop rapide ? Combien de temps l’entrainement devra-t-il être suivi ? Quel rythme ? Quelle reconditionnement physique ? Quelle musculation ? Quelle alimentation ? Quel rythme de sommeil ? Quelle préparation mentale ?

Un travail d’équipe évidemment avec tous les professionnels de santé qui participent aux soins du patient : le médecin spécialiste en médecine générale, le(s) kinésithérapeute(s), l’(les) infirmier(s), le(s) psychologue(s), le rhumatologue, le médecin spécialiste en médecin physique et réadaptation, le neurologue, le(s) chirurgien(s). Mais aussi l’ostéopathe, le chiropraticien, l’acupuncteur, l’hypnothérapeute, le kinésiologue et bien d’autres comme le médecin de la CPAM, le médecin du travail, le médecin expert d’une assurance, les associations de malade… Toutes ces personnes qui gravitent autour du patient qui souffre ont un avis sur la douleur du patient et ses solutions. Leurs discours sont variés, parfois divergents. Ces divergences vont devoir être interprétées par le patient. Et le patient fait un choix : « je préfère telle explication à telle autre, je vais donc plutôt suivre tel soignant… » « Je préfère tel traitement à un autre » et cela selon ses attentes et ses croyances voire même son système de valeurs « je préfère la chirurgie, ça règle vraiment le problème ! » « Je n’aime pas trop les médicaments, je préfère l’homéopathie ». L’harmonisation du discours des soignants est donc impératif. La moindre fissure peut être une autoroute de l’échec. Une brèche trop large est difficile à colmater voire ouvre une voie d’eau impossible à combler.

Comment la consultation de médecine de la douleur sur la PPR intègre-t-elle ces constats ?

La prise en charge de la douleur à la Polyclinique du Pays de Rance (PPR) tient compte de tous ces éléments.

  • Les formations
  • La première consultation
  • Objectif : être acteur
  • Collaborateurs
  • Délai de consultation, temps de consultation et tarifs
  • Types de traitement proposés

Je suis formé à la prise en charge de la douleur depuis plus de vingt années. D’abord à travers mon métier de médecin anesthésiologiste, spécialiste de la douleur aiguë post-opératoire et du maniement des médicaments parfois extrêmement puissants. Puis par ma formation via la Capacité d’Evaluation et de Traitement de la Douleur. Grâce à ma formation de médecin anesthésiologiste, je dispose des compétences utiles pour effectuer des infiltrations périnerveuses avec guidage échographique, voire mettre en place un cathéter péri-nerveux permettant l’application continue pendant plusieurs jours de médicaments anesthésiques locaux.

Ces deux formations principales ont été – et sont toujours régulièrement – enrichies de multiples formations supplémentaires. Je pratique l’hypnose depuis plus de dix ans et l’enseigne par l’intermédiaire de l’Institut Emergences de Rennes, centre d’enseignement reconnu dont le directeur, le Dr Claude Virot est le président de la Société Internationale d’Hypnose. Cette technique est à mon avis, en 2017, incontournable dans la prise en charge de la douleur. Je me suis également formé en thérapie cognitive et comportementale pour la douleur chronique (Pr Larroche à l’Hôpital Saint Antoine à Paris). La Thérapie d’Acceptation et d’Engagement (ACT-Acceptance and Commitment Therapy) a été apprise auprès du Pr Jean-Louis Monestès à Grenoble. Ces nombreuses formations permettent l’application pratique et efficace de l’approche globale, bio-psycho-sociale de la douleur.

Enfin, je pratique l’acupuncture, branche de la médecine chinoise. J’ai appris cette médecin dites alternative en 2003, grâce à une formation sur 3 ans, que j’ai validé sur le plan universitaire par un D.I.U. en 2013 à la faculté de médecine de Nantes.Cette approche permet parfois de voir le problème du patient sous un angle nouveau. Son efficacité pour certains syndromes douloureux est de mieux en mieux appréhendée et comprise. L’acupuncture a, d’un point de vue de la médecine basée sur les preuves (Evidence Based Medicine), toute sa place dans l’arsenal thérapeutique à offrir au patient.

Surtout, je cherche à échanger dans la mesure du possible avec les soignants proches du patient et la famille afin que tous « rament dans le même sens ».

Cette approche passe par une première consultation longue, de une heure voire plus, permettant la plupart du temps d’aboutir à une vision globale du problème douloureux. Cette consultation permet d’exposer au patient – et à sa famille si elle est présente – les causes et solutions possibles à la prise en charge de la douleur. Elle permet de faire des choix immédiats ou de poser des bases qui doivent être réfléchies par le patient et discutées avec l’entourage familial ou médical. Cette approche tient compte des attentes, des souhaits du patient. Parfois ces attentes sont « illusoires » et cela est aussi envisagé au cours de cette première consultation. De temps en temps, une seconde consultation est nécessaire en raison du temps indispensable à une prise en charge correcte et en profondeur des problèmes en lien avec la douleur.

Lors de la première consultation, de multiples aspects de la douleur sont abordés. Par l’interrogatoire et l’écoute surtout. Des échelles d’évaluation sont constamment données à remplir par le patient afin de mieux cerner certains aspects (anxiété, dépression catastrophisme, kinésiophobie, croyances, « coping », injustices ressenties…).

Cette première consultation est à l’origine d’une prescription médicamenteuse, mais pas toujours, voire pas souvent ! Elle a comme objectif principal d’explorer les aspects bio-psycho-sociaux de la douleur, de les expliquer et d’exposer les actions à mener. Car une douleur, surtout chronique, n’a pas UNE seule solution mais un ensemble de solutions qui, côte à côte, aboutiront à une amélioration de la douleur du patient. N’en choisir qu’une ou n’en suivre qu’une aboutit souvent à l’échec.

Parfois, d’autres consultations sont proposées pour le suivi des traitements et la recherche des effets indésirables. L’acupuncture peut nécessiter plusieurs consultations plus courtes avec des intervalles variables selon la pathologie. La thérapie cognitive et comportementale avec ou sans hypnose s’envisage sur plusieurs entretiens (souvent au moins 6) de 45 minutes permettant l’analyse en profondeur du syndrome douloureux. La thérapie brève avec hypnose nécessite entre 4 et 6 consultations.

Un acteur est une personne qui sait ce qu’elle veut, connait le scénario, est confiante pour monter sur scène et jouer son rôle dans la pièce de théâtre.

Une personne actrice de sa maladie est une personne qui connait ses objectifs et ses attentes, connait le scénario pour y arriver, est confiante dans les personnes qui l’entourent, et joue activement son rôle dans la pièce dont elle est le héros. Elle fait confiance au metteur en scène qui organise la pièce à jouer.

Dans tous les cas, l’objectif est longuement discuté entre le patient et le praticien. Cet objectif est choisi par le patient, avec lui, et accepté par le médecin.

La plupart du temps, après chaque consultation, le patient sort en possession de documents qui l’aideront dans sa prise en charge de la douleur. Cela peut prendre la forme de notes d’information sur la douleur, sur un aspect précis, sur le sommeil, l’alimentation, parfois des schémas et tableaux. L’idée est de rendre le patient actif de la prise en charge de la douleur. Qu’il ait des solutions à mettre en place chez lui, loin des soignants. Cet objectif d’être acteur de sa guérison est une des clés de la réussite. La passivité dans la prise en charge d’une maladie chronique peut entrainer une dépendance vis-à-vis de tiers ou de médicaments.

C’est pourquoi l’accent est mis au cours des consultations sur l’information, l’éducation,

l’explication afin de lutter contre les croyances erronées, source de douleur supplémentaire et de chronicité.

Chaque consultation est suivi de l’envoi d’un courrier détaillé qui expose les conclusions de cette approche globale et propose des pistes à suivre. Régulièrement, le téléphone ou le courrier électronique sont utilisés afin de fluidifier le dialogue et de discuter plus directement les options proposées. Ces modes de communications permettent de prendre connaissance d’éléments que le patient aurait pu omettre d’aborder lors de la consultation. Parfois, c’est au patient qu’un appel téléphonique est donné afin de prendre des nouvelles de l’efficacité de traitements, d’effets secondaires éventuels, mais aussi afin de le motiver, de le rassurer, de l’épauler.

Surtout, surtout, surtout, l’approche cognitivo- motivo-comportementale – dites « globale » – est utilisée constamment au cours des consultations et entretiens, même au cours d’une infiltration, au cours d’une prescription médicamenteuse, au cours d’une séance d’acupuncture. La communication dites « thérapeutique » – le langage du changement décrit par Paul Watzlawick – est utilisée sans relâche. L’objectif est d’optimiser l’éducation du patient, de rendre plus efficace la prise en charge, d’amener le patient vers une certaine autonomie. Le rendre acteur de sa guérison.

Comme cela a été évoqué plus haut, la collaboration entre les acteurs des soins est primordiale et indispensable.

De plus, la douleur nécessitant une approche globale, plusieurs professionnels ayant des compétences dans différentes disciplines sont utiles et nécessaires.

C’est pourquoi je travaille en collaboration avec de nombreux professionnels de santé. Au premier plan, les médecins spécialistes en médecine générale et le(s) kinésithérapeute(s) des patients. Il est largement préférable de privilégier l’équipe de kinésithérapie habituelle du patient, pour des raisons de confiance, de commodité, de facilité.

Parfois, un avis est pris auprès du Dr Baglione-Streliski, médecin spécialiste et médecine physique et réadaptative, exerçant à la Clinique de la Côte d’Emeraude à Saint-Malo. Son avis est requis la plupart du temps pour guider sur la rééducation suivie par le patient, confirmer les options thérapeutiques prises voire réaliser des actes techniques propres à ces compétences – en particulier l’infiltration échoguidée des points gâchettes dans le syndrome douloureux myofascial ou l’injection de toxine botulique, entre autres. Le Dr Baglione-Steliski dispose également d’une équipe de kinésithérapeutes, de la cryothérapie corps entier, d’une ergothérapeute et d’une éducatrice thérapeutique.

Régulièrement, il est fait appel à des psychologues afin de réaliser un bilan psychologique et éventuellement débuter une thérapie.

L’hypnose étant une option particulièrement intéressante et utile dans la prise en charge de la douleur chronique, et les délais de consultation étant déjà assez longs, je propose régulièrement les services d’autres hypnothérapeutes : médecin (Dr Reux à Dinan), psychologue (Myriam Eono), kinésithérapeutes (Anne Laure Pallud et Romain Oriel à Saint Samson) ou infirmière (Pauline Vialet à Taden).

Lorsqu’une thérapie cognitive et comportementale est indiquée pour un trouble qui va au-delà de la douleur chronique, l’appui de psychologues spécialisées dans ces disciplines est demandé (Plélan le Petit).

L’équipe de prise en charge de la douleur du CH de Dinan et du CH de Saint Malo sont parfois contactées pour avis. Je participe le plus régulièrement possible aux réunions multidisciplinaires organisées par le CH de Dinan.

Enfin, depuis 2013, je participe activement aux réunions de l’Inter-CLuD du Nord de Rennes.

Ces réunions permettent aux acteurs membres des CLuD (Comité de Lutte contre la Douleur) de chaque établissement de santé au Nord de Rennes d’échanger deux fois par an sur leur pratique et de former un tissu efficace de professionnels de la prise en charge de la douleur. Ces réunions sont organisées à tour de rôle dans chaque établissement de santé et soutenues par Laetitia Fombertasse des laboratoires Grünenthal qui fait le lien entre les professionnels.

Je me déplace régulièrement à la rencontre de médecins généralistes, de kinésithérapeutes, d’infirmiers libéraux afin d’échanger sur la prise en charge de la douleur, les difficultés rencontrées par les professionnels et les réponses possibles à mettre en oeuvre. Je participe régulièrement à des conférences, journées d’enseignement, enseignements post-universitaires. Je réponds à toute demande de rencontre effectuée par des professionnels de santé. Je suis joignable à la Polyclinique du Pays de Rance (02 96 85 85 85) ou par courrier électronique.

Les consultations ont lieu le jeudi au premier étage de la Polyclinique du Pays de Rance à Dinan. Les rendez-vous sont à prendre au secrétariat téléphonique.

Actuellement le délai de consultation est malheureusement de plusieurs semaines. Ce délai cherche à être réduit en ajoutant une journée de consultation supplémentaire le vendredi. Ceci est en cours d’étude.

En cas de consultation pour certains types de douleur (par exemple, syndrome douloureux régional complexe ou algodystrophie, douleur dans le cadre d’un cancer…), un message est laissé aux secrétaires, un rendez-vous est pris malgré le délai. Je contacte alors directement le patient pour proposer un rendez-vous plus rapidement, en soirée après l’activité de bloc opératoire.

Ce type d’approche globale n’étant pas reconnue et tarifée par le système de santé français, les honoraires ne sont pas tous remboursés par la sécurité sociale. Une partie sont des honoraires hors nomenclature et sont parfois remboursés par la mutuelle selon le contrat.

  • Traitements médicamenteux
  • Traitements par infiltration péri-nerveuse échoguidée
  • Traitements par application trans-cutanée (topique, crèmes) exemple Versatis – lidocaïne emplâtre
  • 5% ou capsaïcine
  • Mise en place d’une neuro stimulation trans-cutanée et éducation à l’utilisation
  • Acupuncture
  • Hypnose et thérapie brève
  • Gestion du stress, des émotions, du sommeil, des activités physiques
  • Musicothérapie
  • Thérapie cognitive et comportementale (TCC) pour la douleur chronique
  • Thérapie d’Acceptation et d’Engagement
  • Cette approche type TCC est systématiquement utilisée, dès la première consultation ainsi que la communication dites « thérapeutique ».